Être fier
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Les missions du centre de santé communautaire « La Place Santé » sont plurielles et variées. La conquête des droits sociaux par l’accompagnement des personnes par les médiatrices santé, la promotion de la santé par les ateliers collectifs animés par ces mêmes médiatrices, l’éducation thérapeutique du patient, la musicothérapie, la délivrance des soins, le café santé … Toutes ces actions s’inscrivent dans un territoire au service de la communauté des gens qui y vivent. Cela définit un territoire de santé, c’est à dire pour nous, un territoire où l’exercice de la santé est non seulement organisé entre tous les soignants de ce lieu – eux mêmes en lien avec les structures de soin et sociales de la commune. Mais cela est-il suffisant pour définir le territoire ? Certainement pas.
Le territoire n’est pas seulement géographique et délimité par une frontière administrative, le quartier, la commune, la communauté de commune, le canton… et pour nous la cité du Franc-Moisin. Il est, ce territoire, un lieu de vie, un lieu chargé d’histoire qui s’est construit dans sa réalité sociologique et culturelle au fil d’un temps qui a donc connu des moments divers façonnant petit à petit la réalité d’aujourd’hui. Le Franc-Moisin est un lieu d’immigration depuis plus d’un siècle. D’abord la France de la misère, du sans-travail venant surtout de l’ouest, puis celle des peuples du sud de l’Europe en quête de travail et de mieux-être, et aujourd’hui du monde entier. Ne sommes nous pas dans la mondialisation de la souffrance ? Le territoire de santé c’est donc la vie, avec son quotidien marqué ici par la précarité, mais aussi ces moments de fêtes, ces moments de joies et de deuils, ces moments de grandes solidarités, ces inquiétudes sur un avenir incertain, tant urbanistique que social et politique. Quartier de résistance, il produit à la fois du mal-être et du bien-être, ce curieux mélange qui imprime la vie au quotidien.
Pour une équipe de professionnels qui construit une action de santé sur un tel territoire, cela nécessite tout à la fois des savoir-faire et des savoir-être. Ces savoirs s’acquièrent aussi bien sur les bancs des universités que sur les bancs de la cité. Cette rencontre entre savoir profanes et savoir professionnels, entre mélange des cultures, entre apprentissages réciproques, produit l’offre de santé de la « Place Santé ». Que cela soit le temps du diagnostic, que cela soit le temps de la mise en œuvre de l’action, que ce soit le temps de la réflexion, de la recherche, le travail collectif est notre domaine. Sans lui point de salut et point d’action. Et tant mieux si les médiatrices, les secrétaires, les professionnels de santé, les personnels de gestion et d’entretien appartiennent à un même projet, une même histoire, si, de par le faire-ensemble, ils bousculent les représentations et les hiérarchies de valeurs qui n’ont pas lieu d’être dans la santé communautaire.
Il faut donc sans cesse faire vivre ce collectif, se méfier de l’individualisme qui tente de s’immiscer dans le quotidien pour en dénaturer l’esprit et le sens, il faut se protéger des forces occultes qui tendent des pièges, tellement cette manière de faire perturbe l’existant et déstabilise les modèles d’exercices existants. Il y a encore trop souvent une personne de pouvoir qui, dans une institution, dans une administration, ne connait pas cette façon de faire de la santé et qui par crainte, par peur de l’innovation, refuse de nous aider.
Qu’importe, cette santé communautaire n’est pas née d’une simple réflexion théorique, elle est la réponse à une situation de mal-être de toute une population, qui mérite bien qu’on invente pour elle une forme d’exercice de la santé qui lui apporte peut être pas la bonne santé mais en tout cas le mieux-être. De cela nous pouvons être fiers.
Didier Ménard
Médecin généraliste – Président de l’ACSBE
DÉÇUS ET EN COLÈRE !
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Nous ne pouvons exister et conduire notre projet associatif qu’en répondant aux appels d’offres qui financent les actions. Nous ne pouvons pas nous inscrire dans le droit commun car les pouvoirs publics nous maintiennent dans le champ de l’expérimentation. De ce fait, nous sommes dépendants de ces appels d’offres qui circulent et auxquels nous répondons quand ils peuvent nous permettre de réaliser une action qui rentre dans le champ de nos compétences et qui vient étayer le fonctionnement de l’association.
Depuis plus de 20 ans, nous fonctionnons ainsi et nous connaissons toutes les différences et les variabilités de ces appels d’offres. Nous avons souvent des réponses positives mais nous avons aussi connu des refus. Ces refus peuvent être incompréhensibles au regard de notre proposition d’actions, ils peuvent être irrespectueux quand ils ne sont pas explicités, ils peuvent être aussi injustes quand le projet, mis en regard de l’appel d’offre, est dénaturé.
Nous venons de connaître cette déception avec le refus d’appel d’offre fait par l’INCA (Institut National contre le Cancer).
Nous sommes déçus du refus et en colère car la justification qui nous en est donnée révèle une fois de plus la méconnaissance de la réalité qui s’exprime dans ces procédures de financement du travail associatif dans ce pays. Cela concerne aussi bien la forme que le fond.
Sur la forme :
Nous ne pouvons que nous réjouir de la délivrance d’une explication qui justifie, du point de vue de l’INCA, son refus de soutenir notre action d’améliorer le dépistage du cancer du col de l’utérus chez les habitantes de la cité du Franc-Moisin.
On nous explicite que notre projet a été étudié par des « gens » , qui sont ils ? deux rapporteurs ont donné leur avis et c’est de ces avis que le refus est prononcé. En ce qui concerne notre projet l’un, le rapporteur 1, donne un avis positif, le rapporteur 2 un avis négatif. Le constat est cruel, c’est celui qui dit non qui gagne, pourquoi ? Aucune demande de précisions, d’explications c’est comme cela ! Une/un inconnu décide que non. Cette forme de jugement au regard de la situation des femmes du quartier nous semble irrespectueux de notre travail. Certes l’INCA doit avoir ses raisons d’agir comme cela mais nous ne les connaissons pas et nous ne pouvons que regretter de ne pas mieux connaître la règle du jeu avant de répondre à l’appel d’offre,
Sur le fond :
Le rapporteur 2 justifie son avis négatif en répondant aux mêmes critères que le rapporteur 1, qui lui, les trouve bons. A la lecture de ces avis, il est évident que la lecture du projet est totalement différente. On perçoit des incompréhensions qui ne peuvent s’expliquer que par une représentation fausse de la nature du projet, d’une méconnaissance de ce qu’est la santé communautaire, que le raisonnement est très médical et peu social. On peut certes, nous reprocher d’avoir mal écrit notre projet, qui n’est lisible et compréhensible que par 50 % des auditeurs, il y a probablement du vrai, mais après 20 ans d’expériences nous ne sommes plus des acteurs naïfs.
Nous savons que dans l’étude d’un projet d’action de ce type, certains y verront une innovation qu’il faut soutenir, là où d’autres y verront une action imparfaite parce que ne rentrant pas dans les critères standardisés et donc les nôtres seraient mal définis.
Faut-il donc toujours rentrer dans les normes lisibles par les tenants de l’action classique pour être financé ? Il y a toujours un observateur, un examinateur qui projette son regard figé avec les seuls critères qu’il maîtrise et qui refuse de soutenir l’action de terrain.
Nous sommes déçus de ne pas pouvoir conduire cette action de santé communautaire, nous sommes en colère car une fois de plus l’effort n’est pas fait pour regarder le travail associatif à partir de ce qui le fonde, mais à partir de ce que l’institution voudrait qu’il soit, c’est-à-dire un effecteur des politiques publiques.
Didier Ménard
Président de l’Acsbe-La Place Santé
Médecin généraliste
Comment mesurer ce que l’on fait ?
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Il est indéniable qu’il y aura toujours une grande différence entre ce qui relève de l’organisation de l’action vue par l’institution (administration) et par la mise en œuvre de cette action par les acteurs de « terrain ».
Il n’y a pas d’adéquation entre ces deux logiques, tant la culture et l’organisation de l’action institutionnelle procèdent d’une démarche bureaucratique, ce qui s’oppose par définition, à l’action innovante du « terrain » qui elle, se développe dans une culture de l’expérimentation qui se cherche en permanence – le risque et l’incertitude étant alors ces composantes obligées.
Pourtant, et ce n’est pas là le moindre des paradoxes, ces deux logiques ont besoin de marcher ensemble. La question est alors : comment trouver le point d’équilibre, quand d’une part des professionnels tentent – à partir de leurs savoirs – de construire une réponse à un problème qui est devenu leur quotidien et d’autre part, lorsqu’une institution – souvent sous injonction politique – tente elle aussi de trouver une solution au même problème ?
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Savoir accueillir
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L’année se termine les fêtes approchent, l’esprit de Noël se répand sur la cité.
L’esprit de l’Aïd et Roch Hachana n’est pas encore effacé. Ces moments de fêtes apportent un peu de baume réconfortant face à la misère qui s’aggrave. Les croyances qui sont nombreuses aux Francs-Moisins peuvent aider à supporter les moments difficiles, mais le plus important ce sont ces moments de solidarités qu’elles apportent. D’où qu’elles viennent ces solidarités sont les béquilles des pauvres gens.
« La relève » de Juliette Warlop – sur Public Sénat
Un film inédit réalisé par Juliette Warlop produit par Zadig productions avec la participation de Public SénatDans la cité du Franc-Moisin (Seine-Saint-Denis), plusieurs médecins généralistes vont prochainement prendre leur retraite.
L’un d’entre eux, Didier Ménard, s’en est alarmé : qui va les remplacer ?
Didier Ménard n’est pas un médecin comme les autres. Militant pur et dur, profondément investi dans la cité, il donne son temps sans compter et se bat inlassablement pour les droits de ses patients. Ces derniers le pensent irremplaçable…